Oleg Dou, Batman, 2008.
C’est la rentrée des galeries, l’époque des groups show comme à la Russiantearoom où l’exposition “Am I Beautiful?” regroupe les œuvres de sept photographes russes contemporains émergents. Parmi celles-ci, il y a des images d’Oleg Dou dont on connait le “Batman” (2008) qui est saisissant. Le masque, comme il ce doit, fait corps avec le visage dont la pâleur évoque les portraits peints par Piero Della Francesca. Notons ici que la mère d’Oleg est peintre. La perfection des contours du masque de couleur rouge n’a d’égale que celle des yeux, aux découpes quelque peu reptiliennes, de celui ou plutôt de celle qui se cache derrière. La respiration suspendue du modèle trahit la gêne qui est la nôtre au moment précis de l’instant photographique. Car les modèles d’Oleg sont des gens ordinaires au moment de la prise de vue. Il y a pourtant, dans le travail de cet artiste moscovite, une perfection qui dérange car elle va bien au-delà de celle pratiquée par les professionnels de la retouche d’images du monde de la mode. Notons là que le père d’Oleg est couturier. Cette perfection, à l’époque où nous nous interdisons de rêver le possible calcul génétique de nos futures progénitures, est troublante. A moins que la blancheur cadavérique de ces êtres bien vivants ne soit la source de la fascination qui interdit à notre regard de décrocher. « Am I Beautiful », nous demande donc ce Batman dont la fragilité comme l’androgynie rompt avec la tradition des comics américains. Quand l’être du derrière du masque nous regarde avec une insistance qui, elle aussi, est source de malaise. Or c’est peut-être la fusion de toutes nos gênes cristallisées par l’image qui est la source de notre fascination envers les images de l’artiste contemporain Oleg Dou qui s’inscrit dans la continuité d’un genre, le portrait, à l’ère du numérique.