Dépli, de Tokyo à Montreuil

14_02_28

Thierry Fournier, Dépli, 2013.

La communauté des artistes usant des technologies de leur temps, régulièrement, s’interroge sur le devenir non-linéaire du cinéma. Mais ce qui aurait pu se produire avec les émergences consécutives du CD-ROM, puis du WEB, et enfin du DVD-VIDEO, n’arrive pas. Il n’y a guère que l’industrie du jeu vidéo qui se soit littéralement emparée du potentiel créatif de la non-linéarité alors que les œuvres vidéo, dans le champ de l’art contemporain, ont de plus en plus les allures de longs-métrages, dans l’image, comme dans la durée. Il est toutefois un film interactif qui incite à l’expérimentation temps réel. Il se nomme “Dépli”, dans sa version interactive conçue par l’artiste Thierry Fournier. Mais il existe aussi sous la forme d’un coffret, intitulé “Last Room” qui peut être visionné selon le montage de son réalisateur, Pierre Carniaux. Présenté tout récemment à l’Institut français du Japon, à Tokyo pendant l’événement Digital Choc, ce dispositif sera encore “joué” par le public durant une projection organisée par la Maison Populaire au cinéma Le Méliès de Montreuil. Il s’agit, originellement d’une fiction documentaire tournée en 2007 au Japon, où les histoires personnelles s’entremêlent aux paysages dont ceux des ruines de l’île de Gunkanjima. “Dépli”, dans sa version interactive sur iPad, se présente sous la forme d’une ligne de temps où le spectateur sélectionne l’ordre des séquences. Le film, véritablement “déplié”, est ainsi remonté à chaque séance. Du bout des doigts, on gère la fusion d’une séquence avec une autre, on la ralentit, l’accélère, sans véritablement savoir quelle est la temporalité qui l’emporte, celle des témoignages, paysages, ou encore de l’instant présent ? Les images et les sons se font matériaux, les spectateurs monteurs de ce qui s’interprète dans le temps de sa projection. Le visage d’une femme revient souvent, sous les doigts des opérateurs. Est-ce par son cadrage qu’il nous attire ? Ou parce qu’il est teinté de rouge ? Toujours est-il qu’à l’état d’icône, il séduit les regards. Et il y a cette île de ruines dont on nous raconte l’histoire. Celle de Gunkanjima, désertée par les milliers de mineurs qui l’ont habitée jusqu’en 1974. Elle aussi, revient régulièrement dans l’image projetée résultant de expérience d’un cinéma du tactile et de la non prédictibilité.

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