Katie Torn, Breathe Deep, 2014.
Il y a actuellement à la XPO Gallery une exposition intitulée “Les Oracles” dont le commissaire est l‘artiste new yorkaise Marisa Olson. « Ce que je fais est moins de l’art “sur” Internet que de l’art “après” Internet. C’est le fruit de mes navigations et téléchargements compulsifs », dit-elle dès 2006 lors d’un entretien avec Lauren Cornell, actuellement curatrice au New Museum de New York. Et force est de reconnaître que tous les artistes, tous les curators du monde subissent ou acceptent l’influence d’un Internet qui structure notre relation à l’autre comme à soi-même. Parmi les dix femmes dont les travaux sont présentés dans la galerie parisienne de Philippe Riss, on remarque la série “Embedded files” (2014) de Caroline Delieutraz dont tout le monde sait qu’elle a joué « le rôle d’un bébé dans un film d’horreur à l’âge de deux ans ». Il s’agit de blocs de paraffine au sein desquels l’artiste française a préalablement encapsulé divers supports de données numériques. Or la paraffine, en milieu médical, sert aussi a préserver les échantillons de tissus humains dans l’attente de possibles recherches menées par les épidémiologistes du futur. On se met alors à imaginer les investigations d’archéologues des médias qui, dans un même futur, pourraient scruter les données protégées par l’artiste en quête de virus informatiques protégés par la paraffine. Le futur est un des concepts clés de cette exposition qui s’ouvre sur l’œuvre “There has been a miscalculation (flattened ammunition)” (2007) de Julieta Aranda qui partage son temps entre New York et Berlin. Son installation, des plus provocante, existe par la destruction de romans de science fiction. Car en effet, pourquoi préserver les écrits dont les prédictions se sont révélées inexactes si l’on considère la littérature telle une science exacte, ou “dure” une expression contemporaine de l’arrivée de l’informatique ? Mais revenons à l’usage de l’Internet dont l’artiste Jeanette Hayes nous dit en ligne : « The internet is mine ». Car ce qui est sur Internet est à nous tous, n’en déplaisent aux régulateurs dont Georges Orwell nous annonçait l’arrivée dans “1984”. Mais qu’est-ce qui, dans l’installation vidéo de “Breathe Deep” (2014) de Katie Torn a été récupéré dans la gigantesque corbeille mondiale de l’Internet ? Et que nous dit la jeune femme qui est dans l’image d’un monde de profusion et dont seul le son se réfère au réel d’une nature recomposée comme dans le film américain d’anticipation “Soylent Green” (1973) de Richard Fleischer. Pour que 2022 ne soit pas 2022, allons visiter l’exposition “Les Oracles”.