Christa Sommerer et Laurent Mignonneau, Portrait on the Fly, 2015 – Systaime, Neticones, 2016.
Des portraits, on ne se souvient généralement que des artistes qui les ont peints : de Piero della Francesca plus que d’un Duc, de Théodore Gericault plus que d’un hussard ou de Francis Bacon plus que d’un pape. Car la puissance, en art, est davantage symbolique.
Il y a actuellement quelques portraits exposés sous la verrière du Grand Palais abritant Art Paris. Et l’on remarque parmi eux ceux de la série “Portrait on the Fly” que dessinent des mouches sur le stand de la Galerie Charlot. Les artistes Christa Sommerer et Laurent Mignonneau vivant et travaillant à Linz en Autriche ont commencé par en “capturer” une avant de la “cloner”. Toutes ensembles, elles forment et reforment les portraits de celles et ceux qui ont accepté, un jour, de tenir la pose. Apparemment désorganisées, les mouches se meuvent de point de vues en point de vues. Parfois, le duo les immobilise au travers de tirages dont le statut oscille entre dessin et photographie. En temps réel, jamais les insectes ne se figent simultanément, tentant de capturer un mouvement dans sa fulgurance, de parfaire l’image d’un réel qui résiste. Les mouches, lorsqu’elles connaissent les identités de celles et ceux que l’on oubliera bientôt, dessinent les caractères typographiques de leurs prénoms et noms. Ainsi, elles sont titres autant qu’images.
Dans un même temps, il est d’autres portraits qui s’accumulent en ligne sur le site de l’artiste français Systaime qui les intitule “Neticones”. Car se sont des icônes qui en déterminent les contours. Des icones semblables en tout point à celles qui tracent les chemins des accès aux journaux intimes de nos révélations en ligne, des icones dont le statut oscille entre image et caractère. Et l’on se souvient des portraits en ASCII ART des années quatre-vingt que les émojis réactivent aujourd’hui en couleur. L’histoire de l’art est ainsi faite de tendances que des artistes activent et réactivent en se saisissant des technologies de leur temps et de leur environnement, le nôtre. Tous nous devenons icônes, sans distinction aucune car les images, en ligne (“neticones.com”), n’ont généralement que la valeur symbolique de nos attentions. Soit la plus belle des valeurs.